Le jour de la pré-rentrée était arrivé . Paulette , en compagnie de Yvonne cette fois , fit le long trajet qui séparait Hergnies de Douai . Elles partirent à pied en direction du tramway car il y avait les valises , les très lourdes valises en carton. A Douai , la route leur parut interminable . Quand enfin Paulette reconnut le majestueux portail d’entrée de l’ENF elle poussa un soupir de soulagement . Bien sûr parce qu’elles étaient arrivées et allaient pouvoir poser les valises mais surtout parce que Yvonne allait peut-être arrêter de lui seriner toujours le même refrain . En effet , depuis que Paulette était reçue , sa mère avait entrepris de lui faire la morale . Paulette allait être seule , sans les conseils de sa mère pour bien se conduire donc il fallait faire ceci et cela et patati et patata .. Mieux , Yvonne faisait des démonstrations de ce qui attendait Paulette si jamais celle-ci ne se conduisait pas bien ….et Yvonne en profitait pour passer de solides savons à Paulette , se laissant emporter par son rôle de mère outragée ou plutôt , en profitant pour déverser tout le fiel qui emplissait son cœur . Ce qui dérangeait le plus Yvonne , c’étaient le jeudi et le dimanche. En effet les pensionnaires avaient - si les parents en donnaient l’autorisation - le droit de sortir en ville de 13H à 15H le jeudi et de 13H30 à 16H le dimanche . Le papier émanant du secrétariat de l’école précisait que les élèves pouvaient avoir besoin d’acheter un livre pour leurs études ou tout simplement avoir besoin d’un accessoire de toilette ou d’une paire de bas . Mais l’idée de savoir sa fille lâchée en liberté dans la grande ville rendait folle Yvonne . Là aussi Paulette eut droit aux recommandations et surtout aux simulations en cas d’écart de conduite . Ces scènes avaient eu lieu tous les jours de juillet et d’août et l’on comprend mieux pourquoi Paulette aspirait à ne plus les entendre . Yvonne au moment du départ , avait déclaré de façon théâtrale devant Victor : « Ton père l’a voulu ainsi , tu pourras donc sortir le jeudi et le dimanche en ville . Mais ne t’avise jamais de me faire regretter cette décision ! »