Tout à coup , on frappa à la porte . Surprise , puisqu’elle n’attendait personne , Yvonne alla ouvrir . C’était le frère de Georgine , l’amie de toujours de Paulette . Paulette l’avait parfois vu lorsqu’elle allait chercher Georgine mais , plus âgé qu’elles , il ne leur adressait jamais la parole .Tout d’abord elle ne l’avait pas reconnu . Il effectuait son service militaire et était vêtu du bel uniforme kaki . Ne comprenant pas l’objet de sa visite , mais polis , les parents de Paulette l’invitèrent à s’asseoir . Il commença par expliquer que son service dans l’armée était presque terminé et qu’il avait obtenu une permission exceptionnelle pour le mariage de son frère aîné . D’ailleurs il avait la main gauche bandée et dut avouer à Victor qu’un pétard du mariage avait éclaté trop tôt , lui brûlant la main . Et tout à coup , il devint très rouge et dit très vite : « Je suis venu vous demander la permission de fréquenter Paulette » Le silence dans la pièce devenait pesant , Paulette qui avait entendu , se demandait ce qui se passait et ce que voulait dire « fréquenter ». Ce fut Victor qui prit la parole : « Savez-vous qu’elle n’a pas encore ses quatorze ans ? » Yvonne enchaîna , car elle voulait savoir : « Vous en aviez parlé avec elle ? Qu’en pense-telle ? » Robert avoua qu’il savait que Paulette était jeune , qu’il la connaissait bien puisqu’elle était la grande amie de sa sœur et il confessa avoir longuement interrogé Georgine à son sujet mais compte tenu de son âge et de la sévérité de ses parents , il avait jugé plus convenable de faire sa demande aux parents avant d’en parler à la jeune fille . Bouche bée , Yvonne ne savait plus quoi dire et décida de passer le relais à Paulette . Celle -ci n’avait pas tout compris et lorsque Robert lui demanda si elle acceptait de sortir avec lui , de se parler , de se promener ensemble …. toute à ses préoccupations du moment , elle s’entendit répondre qu’elle n’avait pas le temps car elle devait réviser sa composition de géographie pour demain . Devant les trois visages ébahis , elle crut devoir ajouter qu’il fallait bien qu’elle réussisse ses études si elle voulait devenir une sœur-institutrice . Cette précision mit fin à l’entretien . Robert partit et Paulette assista alors à un grand numéro de Yvonne : la pauvre mère qui s’était saignée, suant sang et eau pour donner à sa fille unique une belle situation , lui laisser une grande maison en héritage et en récompense la voir partir s’enfermer dans un couvent avec le clergé qui ne manquerait pas de mettre la main sur tous les biens qu’elle possédait ! Il fallut à Victor plus de deux heures pour la calmer un peu . Puis Victor parla à Paulette: _ « Si tu as la vocation , je ne t’en empêcherai pas , mais il faudra en reparler quand tu seras plus âgée . Pour l’instant continue tes études , tout au moins jusqu’au Bac et nous reparlerons alors de tout cela . Pour l’instant ne dit plus rien à ta mère . » Lorsque Fernand revint , Yvonne boudait , Victor terminait ses comptes et Paulette avait bien avancé dans ses révisions